Paroles de Le chant des marais
1 - Loin dans l'infini s'étendent
Les grands prés marécageux,
Pas un seul oiseau ne chante
Dans les arbres secs et creux.
Ô terre de détresse
Où nous devons sans cesse
Piocher, piocher, piocher.
2 - Dans ce camp morne et sauvage
Entouré de fils de fer,
Il nous semble vivre en cage
Au milieu d'un grand désert.
Ô terre de détresse
Où nous devons sans cesse
Piocher, piocher, piocher.
3 - Bruits de pas et bruits des armes
Sentinelles jour et nuit
Et du sang, des cris, des larmes,
La mort pour celui qui fuit.
Ô terre de détresse
Où nous devons sans cesse
Piocher, piocher, piocher.
4 - Mais un jour dans notre vie,
Le printemps refleurira,
Liberté, liberté chérie
Je dirai :"Tu es à moi" !
Ô terre enfin libres
Où nous pourrons revivre,
Aimer, aimer, aimer.
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A propos du chant "Le chant des marais"
Le "Chant des Marais" émerge en juillet 1933, au camp de Börgermoor, un des premiers camps de concentration créés pour emprisonner les opposants au régime nazi. Les paroles ont été rédigées par Johann Esser, un mineur de la Ruhr engagé politiquement, et Wolfgang Langhoff, un homme de théâtre, tandis que la musique a été composée par Rudi Goguel, un employé de commerce originaire de Strasbourg. Tous trois étaient membres du KPD, le parti communiste allemand.
Cette composition est née de la révolte face à la coercition des SS, qui obligeaient les détenus à chanter des hymnes patriotiques nazis pendant leur travail. En réponse, le "Chant des Marais" est devenu un hymne de résistance, dénonçant les conditions de vie des prisonniers tout en transmettant un message d'espoir à leurs camarades. La tonalité mineure des couplets contraste avec le passage en majeur du refrain, exprimant ainsi la souffrance et l'espoir.
L'écriture s'est réalisée dans la clandestinité. Rudi Goguel a composé la musique dans le silence de la nuit, au Revier. La première interprétation a eu lieu dans les lavabos de la baraque 8 devant un millier de prisonniers, suscitant une interdiction immédiate par les SS, risquant ainsi de tomber dans l'oubli.
Diffusion et Héritage du "Chant des Marais" :
Libéré en 1934, Wolfgang Langhoff émigre clandestinement en Suisse, rédigeant un témoignage sur sa détention qui sera largement diffusé en Europe, contribuant à la sensibilisation et à la dénonciation du nazisme. La chanson est intégrée dans des œuvres artistiques telles que la pièce de Bertolt Brecht "Grand Peur et Misère du Troisième Reich".
Le chant s'étend rapidement à l'international, réadapté par Hans Eisler pour le ténor Ernst Busch à Londres. En Espagne, il devient un symbole de résistance pour les combattants antifascistes allemands et est diffusé par Radio Madrid. En France, il est chanté par la Chorale Populaire de Paris dès 1936.
Après la guerre, le "Chant des Marais" devient l'hymne commémoratif des déportés. Ses paroles et sa mélodie subissent des modifications, évoluant de chant militant à un hommage à la mémoire des souffrances endurées.
Texte original (traduit de l’allemand par Max Wintersperger)
Où que nous regardions
Il n’y a que marécage et prairie tout autour
Aucun ramage pour nous réjouir
Des chênes sont debout chauves et tordus
(Refrain)
Nous sommes les soldats des marais
Qui portons nos bêches
Ici, dans cette lande aride
Le camp est installé
Ici, nous sommes, sans joie aucune,
Rangés derrière des barbelés
Le matin les convois défilent
Vers les marais, au travail,
Creusent sous le soleil brûlant
Mais l’esprit tourné vers la patrie
Vers le bercail, vers le bercail
Vers les mères, les femmes et les enfants
Certains d’entre nous soupirent
Car nous sommes prisonniers ici
Les sentinelles vont et viennent
Aucun, aucun de nous ne peut s’échapper
La seule fuite possible, c’est la mort
Quatre clôtures entourent la forteresse
Cependant nous ne nous plaindrons pas
L’hiver ne peut pas durer pour l’éternité
Et un jour nous nous dirons :
Patrie, tu es encore à nous
Et alors les soldats des marais
Ne porteront plus leurs bêches